Capital : Votre groupe redresse-t-il la tête, après une année 2009 médiocre
?
Lars Olofsson : Nous sommes en croissance. En France, nous gagnons des parts
de marché, en particulier grâce à Carrefour Market. Notre marque Carrefour Discount connaît un franc succès : 42% des ménages français l’ont déjà achetée. Sur le dernier trimestre, celle-ci
représente 6 à 7% de nos volumes de vente. Et, pour 70%, ces volumes ont été pris à la concurrence. A l’international, nous sommes en croissance en Amérique latine et en
Chine.
(A quel prix ?)…
Capital : Les clients adhèrent-ils à votre nouveau concept de promo libre ?
Lars Olofsson : Ce mécanisme qui laisse au client le libre choix des produits qu’il souhaite acheter en promotion, dans un rayon donné, fonctionne mieux pour l’instant dans le
non-alimentaire. Nous allons lui apporter des touches d’amélioration pour le rendre encore plus clair et mieux spécifier les linéaires qui sont concernés chaque
semaine.
Capital : Votre politique de prix, hier trop inconstante, est-elle bien arrêtée ?
Lars Olofsson : Oui, l’époque du «stop-and-go» est révolue. Aujourd’hui, notre rentabilité doit reposer sur deux piliers. D’une part, la croissance : c’est le premier indicateur de notre santé.
D’autre part, nous devons baisser nos coûts, en améliorant notre façon de travailler pour devenir plus agiles, plus flexibles.
(8000 salariés en moins en 2 ans, c’est ça l’agilité et la flexibilité selon Lars
Olofsson…)
Le regroupement en 2013 de nos quatre sièges en France sur un seul site basé à Massy-Palaiseau s’inscrit dans cet objectif d’économie
et d’efficacité.
(900 emplois en moins, les employés qui perdront leur emploi apprécieront la belle efficacité…)
Capital : Dans votre comité exécutif, vous n’avez gardé qu’un «Carrefourien». Pourquoi ce grand ménage ?
Lars Olofsson : J’avais besoin de marier l’expertise des managers déjà présents dans l’entreprise au regard neuf de nouveaux talents. Je les ai trouvés chez Tesco, la référence en matière de
culture client, chez Wal-Mart, le champion de l’efficacité opérationnelle, ou encore chez Procter & Gamble, sans doute la société la plus pointue dans le
marketing.
Capital : Votre expérience chez Nestlé vous sert-elle à réformer Carrefour ?
Lars Olofsson : Une des grandes forces de Nestlé, c’est d’avoir une stratégie de long terme, connue de tous et qui engage tout le monde.
Ma priorité chez Carrefour a été de redéfinir notre «rêve», notre ambition en tant que commerçants.
Simple question, depuis quand Carrefour est redevenu commerçant?
Parce que depuis la fin des années 90...
Capital : Quel cap avez-vous donné ?
Lars Olofsson : Je veux
que nous devenions les commerçants préférés.
Toute notre énergie doit être consacrée aux clients.
(Quelle énergie...? Celle des magasins sans employés ? Celle du tout « Made in China ?)
Avant, Carrefour, c’était l’entrepreneur conquérant : aucun distributeur au monde n’est présent dans autant de
pays.
Désormais, la priorité, c’est de conquérir le cœur des clients.
Ce n’est plus d’ouvrir de nouveaux marchés.
Capital : Allez-vous en quitter certains ?
Lars Olofsson :
Carrefour est rentable dans tous les pays où il est présent. Je n’ai donc aucune pression. L’idéal, c’est d’être leader sur chaque marché pour avoir les meilleures synergies de coûts, de
marketing, la meilleure puissance d’achat. J’ai par exemple fermé la Russie, où nous avions des années de perte devant nous. On ne combat pas avec un petit fusil quand on a des canons en face. Il
y a des marchés où je ne suis pas leader, ni certain de le devenir un jour : si jamais j’ai une offre de rachat, je suis prêt à la regarder.
Capital : Avez-vous trouvé la formule pour relancer vos 230 hypermarchés ?
Lars Olofsson : Je suis
sûr que nous allons améliorer nettement notre offre et réenchanter les clients. Nous savons assez bien ce qu’il convient de faire. Fin août, nous
ouvrirons un magasin de référence pour vérifier nos hypothèses. Nous allons définir des catégories de produits déterminantes qui justifient que l’on se rende dans nos hypers. Nous devons créer
l’événement, surprendre avec des choses qu’on ne voit pas ailleurs.
(C'est sur, des hypers avec un assortiment réduit de 15% et la Marque Leader + Carrefour+ Carrefour Discount ça va
surprendre le client...)
C’était le sens
de l’hyper il y a cinquante ans.
Capital : Vous allez y réduire de 15% le nombre de références. Pourquoi ?
Lars Olofsson : C’est pour le bien des clients et c’est la seule chose qui m’importe. Nous voulons leur proposer moins de marques tout en satisfaisant plus largement leurs besoins, ce qui
permettra de rendre les linéaires plus lisibles.
Au final, il y aura environ 15% de références en moins, mais 5% de choix en plus.
(Celle là même à Marseille, ils n’auraient pas osé…)
Accessoirement, cela permettra de faire des économies logistiques.
C’est un projet unique au monde.
Capital : Cela promet des discussions musclées avec les industriels ?
Lars Olofsson : Elles
ont été musclées au début. Aujourd’hui, vingt et un grands fournisseurs s’inscrivent dans ce schéma. Il y aura bien sûr des perdants. Je veux privilégier ceux qui sont capables de créer de la
croissance. Cela favorisera peut-être les marques leaders, mais, pour des offres spécifiques et pour nos produits à marque Carrefour, les PME ont toutes leur
place.
Ben voyons, il faut m’expliquer comment Carrefour négocie tarif et gammes avec les marques leader, réduire de 15% les références et
annoncer que les PME « ont toute leur place »…
Cela fait déjà 5 ans que Carrefour avec sa politique d’imposer au maximum le même magasin où qu’il se trouve, ainsi que sa politique
d’achat totalement orientée sur l’importation massive de produits « low-coast » et donc également favoriser les marques leader et la place
de la PME chez Carrefour, elle se situe où ?...
Capital : La vente des murs des magasins est-elle toujours d’actualité ?
Lars Olofsson : S’il s’agit uniquement de vendre les murs, je suis contre, car cela ne renforcerait en rien la marque Carrefour. Dans notre métier, il est important de maîtriser le foncier. En
revanche, je n’exclus pas d’en céder une partie pour financer des acquisitions ou, à l’inverse, de racheter des galeries commerciales pour mieux gérer nos flux de
clients.
Capital : Vos actionnaires de référence, Bernard Arnaud et Sébastien Bazin, vous donnent-ils du temps ?
Lars Olofsson : Nous avons construit un projet sur trois ans, voté à l’unanimité par le conseil d’administration. Aujourd’hui, nous sommes dans la mise en œuvre de ce plan et j’informe
régulièrement le conseil, comme l’actionnaire de référence Blue Capital, de sa progression. C’est dans le temps que j’adapterai notre organisation.
source: Capital